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Avec le concours du MAD
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Avec le conconours de la Presse Régionale
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Association pour l'aide aux jeunes auteurs

Robin MERCIER – Hô-Chi-Minh Ville

Ville de chair grise. Terre de landes. Et Béton.

Chez Hô-Chi-Minh, maître lavomatique.

Presser bouton « tellurique ». Et entrer dans le dense.

Soleil. Lever-coucher. Gens. Gens. Motos. Néons. Nuit Nuit. Jour. Lampadaire. Gaz. Manège. Tourner. – Pourquoi ? – Si. Tourner. Canal. Canaux… Cané.

C’est demain. Lavage des eaux usées.

L’usure guette. L’équation est rentable. Se jeter dans l’exponentiel. Croissance playmobil. Le chargeur plein, la roulette tourne et enivre.

Marteau-piquer. Creuser. Poutrer. Tout va bien. On tourne et fraise. Le buffet est froid. Le sang de sable. L’acier trempé.

Travailleur perméable. Confondu dans une illusoire démonstration de sa force. Le subjuguer sans cesse pour ne pas qu’il étouffe.

Son habitat naturel, la maison mitoyenne. Prise entre deux autres et puis deux autres encore. Quatre mètres de large, dix de long et les étages s’empilent. On cherche encore la classe moyenne.

Sueur des moussons s’abstenir.

Prendre son pouls et traquer le surréel. Cette ville se rôde et s’apprivoise par flash. L’urbain en sachet. Instant lucide. Vite, la course à l’émotion !

Moto-Guidonnant.

Guidonné.

La valse à mille temps des trajets quotidiens est une tentation à se laisser souffler, soudain, par les aspérités du trafic. Comme un cri, couper la machine pour rendre au corps son droit à la respiration. Aux yeux leur devoir d’observation. Les extirper des mil-lisibles visages croisés en chemin.

L’homo motoripedus placidus.

Le masque. Toujours. Un Non à l’émotion. Comme promesse d’une plus grande réactivité au feu rouge. Point le temps de s’appesantir d’une extraversion au nom d’oiseau.

L’urbain est cirque, alors pour l’écouter rien ne vaut un pont.

Suspendus au-dessus des eaux noirâtres, regard et idées s’échappent vers des rives qui grouillent. Et pourquoi ne pas aller jusqu’à verser dans la griserie, jusqu’à émerveiller ce cauchemar d’Homme ? Et reluquer cette chouette perchée sur la vigie de quelque vieux rafiot. Hululant aux rats affairés en bas du quai qu’elle portait en son bec un fromage…

Moderne, tout s’y bouscule.

Mégalomaniaque la ville semble pousser ses habitants à l’eau. Bicoques, cahutes et autres tohu-bohu congrus à visée dormitive s’annexent au ras des nénuphars à la douce mesure de la science-fiction immobilière. Des quartiers entiers, pelouse millimétrée et pavement profilé, émergent quant à eux, des terres dites banlieusardes. A peine éveillés, déjà sulfatés comme une rizière bien éduquée. Contre la mauvaise herbe.

Labyrinthe sans collines. Il faut grimper dans les gratte-ciels pour s’offrir un poste de guet et contempler le rouleau à bétonnerie qu’est cette ville. Dédale de boulevards à perte de vue. De dedans on étouffe, du dessus on s’éberlue du pourquoi du comment. Une telle concentration d’humains. Alors quitter la ville s’avère d’une redoutable efficacité pour en savourer un peu plus les disproportions. En bénéficiant de la directive retour, on peut même se laisser aller à un peu de mélancolie urbaine.

La cité a aussi cette force fascinatoire où luttent tant d’énergies de survie. Noire de monde, une énorme machine à broyer. Mais ses bruits, ses odeurs qui viennent vous surprendre aux détours d’un trottoir. S’autoriser l’évasion. Pour peu que le houblon vous ait embrumé l’esprit, marchant tel l’hymne du relâchement, quasi dilettante, s’imaginer fumant, goûter au calme de la soirée naissante, la lumière ocre du divin, et puis un instantané pour toujours… une effluve d’égoûts, un chantier qui fait les 3/8, une subtile sonate aux instruments pneumatiques, un pont autoroutier, un coin pisse et les sirènes d’ambulance qui se perdent dans le ballet des grues.

« C’est beau une ville la nuit ».
-Ta gueule, disait l’autre.

Contre les bleus, la glace. Boire ne se fait pas sans glace. Café, fruits pressés, thé, Bière. Tout. Du frais, du glaçon.

Anti-moiteur. Soda sexy.

S’égrainent bars et cafés dans lesquels la surexposition des idoines attributs des hôtesses ne fait point mystère sur le produit phare de la carte du boire et du manger. Ouvert du soir au matin sous sa chère blanche perruque.

Volupté. Mille pagodes. Money !

On y pêche. On y vit. S’en fout-on vraiment ?

Pourtant l’illusion est parfaite. Ça clignote. Boutiques. Boutiques. Boutiques. Marché à Fruits. Chariots à nouilles. Madame Légumes. Juste un riz merci. Fruits Viande Fruits. Le système est dé.

Alors jouons !

Cette ville ronge l’humain. Le met sous clim’ et l’anesthésie à grand coup de shopping.

Bigarrée qu’elle est.

Vouloir s’attacher les services d’un arbre. Une trace d’oxygène, comme un fossile. Prendre racine, ou un tronc pour ne pas couler.

Atmosphère de lutte. Contre qui, pourquoi, on ne sait plus vraiment. Mais le poids de l’histoire se lit à chaque coin de rue. Les grands axes aux grands noms des libérateurs. La ville du patriote et ses artères combattantes, comme des viscères marquant ses habitants au corps.

Tatouer le Sud du sceau des vainqueurs. Meurtri. S’asphyxier les uns, les autres. Ensorceler les démons du rétroviseur.

17h, un quartier d’usines. Spectacle du changement d’équipes. Le textile va bon train. On charge et décharge des femmes par milliers. Les machines respirent le temps du turnover.

Capitale régionale d’un Vietnam uni, terre d’asile des capitaux, le Nord vient y faire des affaires. La jeunesse y goûter aux affres d’une liberté plus dorée qu’ailleurs.

Une quête de confort. Tout simplement. Pour combler le vide.

Et s’attaquer au souterrain. 2015, le métro. Subtilement, submerger, subordonner.

Le « sub », credo contemporain. Subir et subterfuge.

Au dessus ça gronde. Le ciel pèse de sa lourde proximité.

Goûter une pluie diluvienne.

Rinçage avant essorage.

Heure creuse. Programme nuit. Le réservoir plein. Trotter sur son poney spatial. Non bis in idem. Serait-on ici en avance ou en retard ? Plein gaz, rien ne se perd, tout se transforme. Les phares sont comètes. Voyage dans la galaxie des En-casqués. La tête dans le flou, tout n’est que laser, la ville respire d’elle-même. Le reste n’est qu’hybride.