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Association pour l'aide aux jeunes auteurs

Désiré BANSE – Le Burkina revu par un burkinabé

Burkina 1

Voyage d’un retour au pays. «Peu importe le temps que passe le bois mort dans la rivière, il ne deviendra jamais un crocodile» m’avait dit le vieil homme à mon départ du Burkina-Faso. Carnet de voyage.

Après trois années d’études en France qui m’ont beaucoup changé, je retourne au Faso pour deux mois de vacances.
Zabré : Vie quotidienne

Arrivé par avion à Ouagadougou, le trajet pour Zabré est long, 4 heures d’autocar pour 100 km d’asphalte puis 75 km de piste dont 20 km en mauvais état. La dernière portion est un vrai calvaire.

J’ai passé mon enfance à Zabré. J’ai trois grand-mères du coté de ma mère, car mon grand-père avait trois femmes. Elles se marrent tout le temps quand elles sont avec moi, parce qu’elles trouvent que ma façon de parler le Bissa, notre langue locale, est bizarre et amusante. Entre les mots que j’ai oubliés, ceux dont le sens m’échappent un petit peu et les mots français qui ne se traduisent pas (ordinateur, micro-onde), c’est difficile.

Au marché local, qui se tient tous les trois jours, j’ai retrouvé des amis. On y voit des femmes qui font leur petit commerce, qui tiennent des étals de denrées alimentaires, de marchandises diverses. Les hommes font des réparations de chaussures, d’ustensiles et d’appareils électroniques. Il y a aussi les boutiques de produits manufacturés et de pagnes, les quincailleries, la pharmacie. Il y a également de nombreux maquis, des bars où l’on peut boire de la bonne bière et souvent manger et surtout les cabarets de dolo, la bière locale. C’est un lieu de rencontres, la vendeuse est au centre. Elle distille à coup de calebasses son précieux liquide, à la hauteur de la commande. Le litre coûte 150 FCFA (1€ = 655.957 FCFA). Très souvent une jeune fille la remplace et cela se voit tout de suite. La moyenne d’âge de la clientèle descend et les montants des commandes grimpent vite pour impressionner la demoiselle. Sur ce marché, il y a aussi les femmes peulhs, une ethnie de pasteurs, qui vendent du lait de vache. Tout juste derrière se trouve l’endroit où l’on peut acheter de la viande. Pas loin sur la droite, on aperçoit la place des céréales, maïs, mil, sorgho, arachide et autres haricots. Cependant, en cette période de l’année, elles sont rares, car les récoltes de l’année précédente s’amenuisent tandis que les nouvelles céréales ne sont pas encore prêtes. Plus loin, il y a aussi les couturiers, tailleurs d’ébène, d’étoiles et de pagnes. Les sens sont assaillis de toutes parts. Les yeux par les couleurs des pagnes des femmes et des habits des hommes, le nez par les odeurs du beurre de karité, du tabac et du soumbala, constitué de graines de néré servant comme ingrédient en cuisine. Tout le monde se salue, ce qui fait beaucoup de bruits et comme beaucoup de gens affluent sur la place, on se bouscule, il y a beaucoup de contacts physiques.

Un matin, avec Camille, une amie française, nous sommes allés aider le boulanger à faire son pain. Au CP1, j’ai appris des phrases comme « Le père d’Alain fait du pain ». Dire qu’il aura fallu attendre 15 ans pour savoir réellement ce que c’est que faire du pain. Ce n’est pas la nourriture typique dans le coin, mais cette boulangerie a beaucoup de succès et le pain devient plus en plus une habitude de consommation.

A deux pas de là se trouve la radio locale. Elle traite entre autre des annonces d’hygiène sanitaire. A leurs côtés, de la musique et des brèves d’actualité se disputent l’antenne avec des communiqués épiques du genre « J’ai perdu mon bœuf, il est blanc avec des rayures noires sur le coté. Prière de me contacter au 70 12 34 56 si vous le voyez … ». Presque tout est en langue locale. Cette radio a apporté un réel progrès, rendu possible par l’avènement de l’électricité installée une année plus tôt seulement.

Mon frère Raoul nous a amenés sur les bords du Nazinon autrefois appelé la Volta Rouge. Le bord de l’eau ressemblait à une plage avec de vrais coquillages et du sable fin. Le retour s’est fait dans des herbes plus hautes que nous et sachant que les serpents pullulent dans la zone, nous avons continué en file indienne, sans autre repère que le sens de l’orientation de Raoul.
Bobo-Dioulasso : Tourisme au vert

Un ami, Zerbo, nous a amené aux dômes de Fabédougou. Là-bas, la nature est à l’état sauvage. Le relief unique en son genre, pittoresque, nous a laissé bouche bée. Autour, il y a beaucoup de verdure, avec des arbres aux feuillages de toutes sortes.

Puis Zerbo nous a amenés aux cascades de Banfora. C’est magnifique, toute cette eau donne une impression de pureté et de force. En contrebas, il y a une vraie forêt avec des plantations de bananiers et du maraîchage qui témoignent de la fertilité du lieu. Je me suis baigné, heureux de pouvoir le faire dans un endroit aussi magnifique. J’ai pris des photos, des vidéos comme les nombreux touristes qui étaient là. C’était assez bizarre pour moi de me sentir comme eux dans mon propre pays.

La grande mosquée de Bobo-Dioulasso est historique. Des bouts de bois dépassent un peu partout des murs ce qui donne une apparence assez particulière au lieu. Le guide nous a expliqué que cela servait en quelque sorte d’échelles. N’ayant pas d’échafaudages à l’époque, les bâtisseurs enfonçaient des bouts de bois dans les murs pour pouvoir continuer à construire en hauteur en montant dessus.
Tikaré-Kongoussi : Une idée de Blanc

À 50 km de Ouagadougou vers Tikaré, le paysage devient tout à fait différent. La végétation est plus rare et les arbres plus petits et espacés. On avance doucement vers le Sahel. Même la couleur du sol change. A l’horizon se profilent quelques petites collines qui forment une ceinture rouge. Au kilomètre 105, nous avons dû abandonner la route asphaltée pour emprunter une piste.

À Tikaré, je réveille mes amis à quatre heures pour aller voir le lever du soleil sur la colline qui ne doit pas être très élevée, quand on sait que l’endroit le plus haut du Burkina est le Ténakourou, qui culmine à 750 m. C’est la première fois que je suis monté sur une colline dans mon pays. Dire que j’ai commencé par les sommets des Vosges ! On a accroché des lampes torches à nos têtes pour nous éclairer. Le soleil nous a attendu pour se lever. C’est une vue panoramique imprenable sur tout le village et ses environs. Au petit matin, c’en était presque magique ! Le vert de la végétation, le bleu du ciel et les flammes orange de l’astre formaient une combinaison harmonieuse. La descente fût plus difficile que la montée. La nature là-bas est reine, il n’y a pas de passage, ni de sentiers balisés. Il faut juger au hasard quel est le chemin le moins dangereux et se lancer. La randonnée n’est pas le sport national au Burkina.

De retour à Ouagadougou, j’ai pris l’avion pour Paris. J’ai quitté à nouveau les gens que j’aime, ma famille, mes amis, mon pays, pour retrouver mon autre monde. Deux cultures différentes, deux mondes contrastés qui pourtant me définissent aujourd’hui.
Burkina 2
Burkina 3
Burkina 4